Collègue dépressif

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Mokuren
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Inscription : 15 nov. 2012, 11:56

Collègue dépressif

Message par Mokuren »

Bonjour,

Je viens de découvrir ce forum et j’ai décidé de me lancer moi aussi, en remerciant par avance les personnes qui auront le courage de me lire jusqu’au bout. Je dois faire face à une situation délicate vis-à-vis d'une ancienne collègue dépressif qui m’envahit avec ses problèmes. J’aimerais l’aider mais l’attention qu’elle me demande est au-dessus de mes forces et je ne sais plus quoi faire pour me détacher.

Je replace tout d’abord l’histoire dans son contexte. A 36 ans, je suis actuellement en recherche d'emploi et j'ai dernièrement effectué, entre mai et septembre dernier, une mission d'intérim de rédactrice dans une grande entreprise. Au bout d'un mois et demi de mission, à la mi-juin, ma responsable m'a fait part des félicitations de la hiérarchie sur mon travail et m’a proposé de me prolonger après l’échéance du contrat (prévue début septembre). Pour cela, il fallait que je réorganise mes vacances prévues en septembre pour les décaler à octobre. J'ai accepté.
Parallèlement, j’ai sympathisé avec une autre rédactrice de l’équipe, que j’appellerai E et qui est la raison de mon post sur ce forum. J’ai vite perçu chez E, la cinquantaine, un caractère entier avec une tendance à monter facilement sur ses grands chevaux, notamment avec la responsable (à peine plus âgée que moi). Dans nos échanges, j’appréciais le côté franc du collier de E, justement.

Tout se passait bien jusqu’à la mi-juillet. Mais suite à des annulations de RDV de la part de collaborateurs (que j'avais besoin de rencontrer pour écrire mes articles), l'un de mes dossiers a pris un peu de retard et ma responsable a paniqué. C'était sa première expérience managériale, elle n'occupait cette place que depuis quelques mois (auparavant, elle occupait la mienne) et lorsque nous avons été confrontées à ces contretemps, sa chef était en vacances. Elle s'est mise à me convoquer constamment à des entretiens pour faire le point, me demandant de me justifier sur tout mon emploi du temps. Elle me lançait même des regards noirs quand je m’absentais pour aller aux toilettes. Au début, voyant cela comme un signe de stress de ne pas être à la hauteur, j’ai pris sur moi. Suite à un entretien très tendu, j’ai tout de même contacté mon agence d’intérim pour leur demander conseil. Ils m’ont recommandé de bien garder les traces écrites prouvant que notre équipe n’était pas en cause dans le retard et de lui faire un bilan par mail de tous les impondérables afin de la rassurer. Ce que j’ai fait et visiblement ça l’a tranquillisée un moment (elle a même reforwardé mon mail à ses chefs plus tard). Mais une ou deux semaines plus tard, sans élément déclencheur apparent, elle m’a annoncé que finalement, elle ne souhaitait plus me prolonger, prétextant que certes, mon travail donnait entière satisfaction, mais que je ne « m’épanouissais pas sur le poste » sur le plan personnel (j'avais soi-disant l'air morose, je vous assure qu'elle m'a sorti ça comme motif!). J’ai tenté d’argumenter mais en vain.
Plus tard, j’ai compris deux choses :
1/ Le budget avait été resserré pour septembre-octobre ;
2/ La responsable ne pouvait pas voir en peinture E, dont je m’étais rapprochée, et voulait s’en débarrasser.
Quelle est la véritable raison de l’annulation des suites de mon contrat ? Je n’ai pas la réponse exacte, mais je pense que mon amitié avec E m’a nui, indubitablement. Je le sentais déjà un peu à l'époque, mais je ne suis pas du genre à prendre distance de quelqu'un avec qui je m'entends bien juste parce que c'est dans mon intérêt.

Une ou deux semaines après que j'ai su que je ne serais pas prolongée, j’ai appris que E avait été convoquée à la DRH pour une minuscule erreur (genre, ne pas avoir intégré une virgule dans un texte). E s’étant confiée à moi lors d’un déjeuner, je n’ai pas résisté à lui raconter mon affaire... J'étais vraiment en colère après la responsable, qui m'avait fait réorganiser mes plans de vacances pour une prolongation de contrat qui n'est finalement pas venue.
A posteriori, je pense que raconter cela à E était une erreur, mais on ne refait pas le passé. Par la suite, E et moi sommes devenues inséparables ; et ce, même si j’ai vite vu venir l’amie possessive. Il y avait en effet encore une 3ème autre personne dans l’équipe, une rédactrice, qui avait un caractère très posé et avec qui je me suis bien entendue tout du long. Mais E ne pouvait pas l'encadrer (elles s'étaient disputées avant mon arrivée dans l'entreprise). Dès que je passais du temps avec cette autre collègue, E adoptait une attitude froide, sans toutefois dire quoique ce soit d’explicite. En bref, elle voulait que je sois exclusive. Pour ma part, même si je m'étais rapprochée d'elle, je n'allais pas pour autant me fermer aux autres.
D’autre part, la mauvaise humeur de notre responsable pendant le mois de juillet nous a fait passer à toutes de mauvais moments. Ainsi, lors de nos déjeuner en tête à tête, E et moi avons aussi passé pas mal de temps, je dois l’admettre, à dénigrer la responsable. Même s’il y avait des raisons, avec le recul, je vois bien que cela en devenait malsain. Surtout qu’en général j’évite de cultiver ce genre d’attitude – ruminer avec quelqu’un d’autre.

Le début du mois de septembre est arrivé, j’ai bouclé tous mes dossiers. Avec la responsable, qui avait pris des vacances en août, des contacts cordiaux, bien que distants, s’étaient rétablis et nous ne nous sommes pas quittées en mauvais termes. D’autre part, j’ai laissé mon e-mail à E et nous avons repris contact par la suite. Et puis je suis partie en vacances début octobre, en Corée du Sud, un voyage que je planifiais depuis longtemps. Ravie de mon voyage, j'étais passée à autre chose. J’ai repris activement ma recherche d’emploi, tout en me consacrant au lancement d’un blog en collaboration avec ma sœur, dont je suis très proche. Bref, j’étais d’humeur à entreprendre.

Le moral était plutôt bon, jusqu’à ce que E m’envoie un texto disant : « Virée ».
Je l’ai immédiatement appelée par téléphone et j’ai eu confirmation : elle était licenciée. A 56 ans, c’est dur à encaisser… Bref, j’ai écouté ses confidences. Une dizaine de jours après, nous avons partagé un repas ensemble. D’après ce qu’elle m’a raconté, la responsable voulait vraiment sa peau. J’avais été témoin de certaines choses mais ça avait empiré depuis. Par exemple, elle se faisait convoquer à la DRH au moindre mot de travers, à la moindre virgule oubliée dans les corrections d'un texte. Elle s’est même fait, un jour, convoquer à la médecine du travail sans raison. Comme elle avait fait un burn-out au début de l'année, je pense qu'ils essayaient de la stigmatiser. En fin de compte, elle s’est fait littéralement exécuter, avec la complicité de la hiérarchie et de la DRH.
Malgré tout, pour nuancer les choses, il est clair aussi que son attitude agressive lui a joué des tours.Il y a aussi autre chose : elle m’a montré un mail qu’elle a envoyé à la responsable suite l’un de leurs entretiens houleux, et dans ce mail, elle m’a plus ou moins impliquée! En fait, elle implique tout un tas de gens, mais dans ce qu’elle a dit sur moi, elle sous-entend qu’on a pas mal échangé sur la responsable de l’équipe pendant ma mission… Quand j’ai vu ça, j’ai bondi et je lui ai demandé si elle comprenait qu’elle risquait de me griller dans l’entreprise ? Sachant que cette boîte est le principal client de mon agence d'intérim... Elle m’a assuré que je me faisais des films, que cette responsable n’avait pas un tel pouvoir. Depuis, elle m’a forwardé un autre mail destiné à je ne sais plus qui et dans lequel elle implique une nouvelle intérimaire qui a été recrutée entre temps dans le service. Flippant. Elle semble incontrôlable.

Et surtout – et c’est cela qui m’a poussé à écrire ici – depuis son licenciement, elle m’envoie des mails tous les jours, à n’importe quelle heure, pour me raconter par le menu ses états d’âme. Elle ne me téléphone pas, heureusement, mais je reçois 2 ou 3 mails par jour. Je ne lui réponds qu'une ou deux fois par semaine. Quand je tarde un peu trop, elle finit toujours par me demander si je la boude, par me culpabiliser…
Dans ce qu’elle m’écrit, elle semble confondre ma boîte mail avec son journal intime. En plus, elle me forwarde TOUS les mails qu’elle écrit aux personnes liées à cette affaire. Je précise que je ne lui ai jamais demandé de me forwarder quoique ce soit. Quand on s'est vues, je lui ai dit de me tenir au courant, mais ce que j'entendais par là, c'était de le faire quand on se reverrai !
Elle pense que je suis la plus à même de la comprendre, mais en ce qui me concerne, ma mission ne se résume pas au petit contentieux que j'ai eu avec mon ancienne responsable : le travail lui-même était très enrichissant et j’ai eu par ailleurs de bonnes relations avec tous les collaborateurs. Et puis, même en ce qui concerne la responsable, j'ai mal digéré son revirement mais je n'ai pas non plus nourri une haine viscérale contre elle, faut pas exagérer ! Pour tout dire, se faire mener en bateau sur les suites potentielles d'un contrat fait partie de la condition des intérimaires. Il faut savoir tourner la page. Avec les mails d'E, j'en viens à ruminer ces histoires alors que je ne suis restée que 4 ou 5 mois là-bas...

Comme elle flippait avant son entretien préalable de licenciement, je lui ai conseillé de se faire accompagner par un délégué syndical. J'ai souligné qu'après tout, ces personnes étaient justement qualifiées pour l'aider. Sur le coup, elle a rejeté mon conseil mais finalement, elle l’a fait, tout me l’annonçant comme si c’était sa propre idée. D’ailleurs, quand je lui donne un conseil et qu’elle le suit, elle rejette d’abord en bloc avant de finalement ramener cette idée sur le tapis tout en faisant comme si celle-ci venait d'elle-même, voire de quelqu’un d’autre. Comme si elle voulait m’en enlever le crédit. La première fois, j'ai pensé qu'elle ne s'en rendait pas compte mais là c'est devenu récurrent.

Tous les matins, je me connecte sur mon PC pour voir mes mails et faire un tour d’horizon des offres d’emploi. Chaque fois, je découvre dans ma boite 2 ou 3 mails venant d’elle, et là, j’ai vraiment envie de l’envoyer balader. Mais il y a des phrases qui m’interpellent. En voici quelques unes pour que vous voyiez le ton :
« Je suis salement très amochée, pour tout te dire ! », « J’ai une trouille bleue », « Je ne pensais pas morfler autant ! […] non, vraiment, ce monde n’est pas fait pour moi », « Je n’ai absolument plus aucune envie de me débattre dans la marre... Je suis fatiguée, désabusée... Je ne veux plus me battre. Plus de forces. » Tout cela au beau milieu du récit de ses démarches avec son avocat, son délégué syndical (avec qui elle a finalement réussi à se brouiller!), ou encore des soirées qu’elle passe avec telle ou telle amie.
Ma sœur me dit de ne plus lire ses mails. Mais il faut voir les titres : « Dimanche de merde », « Insomnies », « Je renonce !!! » ou encore « Je suis très mal… » (Ça, c’est celui de ce matin).

Bref, ma question est la suivante : quelle attitude adopter ?

Je ne vais pas vous cacher que, égoïstement, j’aimerais parfois qu’elle sorte tout simplement de ma vie. Alors que je suis quelqu’un d’assez insouciant, en général, toujours plongée dans ma musique et mes films, et que j'ai plein de projets créatifs sur le feu (mon blog, un recueil de nouvelles, etc.), ces temps-ci je n’arrive plus à faire grand-chose. Je sais que c’est aussi l’effet du chômage et que je me sentirai mieux quand j’aurais trouvé un boulot. Mais en attendant, ce n’est pas que j’y pense en permanence mais dès que je vois son nom dans ma boîte mail, je ressens une sorte d’effroi… Je vis cela comme une forme de harcèlement. Ironie du sort, elle se fait elle-même harceler par son ex en ce moment, au point d'avoir dû changer de numéro de téléphone.
Elle m’a dit dernièrement qu’il fallait qu’on se voie afin qu’elle me montre sa lettre de licenciement. Mais je n’en ai pas envie. Je lui ai répondu que j’étais un peu patraque en ce moment, mais elle n’en a que faire et m’a sous-entendu que son état moral dépendait du fait que l’on ait une entrevue.

Je ne veux pas faire n’importe quoi car elle est vraiment en détresse psychologique - je pense que tout ce que je vous raconte en témoigne. Mais je ne veux pas non plus sombrer dans une emprise malsaine. Comment trouver les mots pour lui faire comprendre que tout cela devient trop lourd pour moi ?

Merci beaucoup si vous avez pris la peine de me lire jusqu’au bout (j'ai conscience que mon texte était très long).

Dans l’attente de vos conseils…

M
Azurys
Messages : 1156
Inscription : 29 juin 2012, 19:30

Re: Collègue dépressif

Message par Azurys »

Lui dire qu'à se stade vous ne pouvez pas grand chose pour elle et que si elle veut vraiment s'en sortir, elle doit consulter un psychologue au plus vite, quitte à parler de son mal-être à la médecine du travail et que cela ne sert à rien de vous enovyer des mails car vous ne pouvez rien faire pour l'aider et que ça ne l'aide pas elle non plus mais ne fait que lui rappeler ses déprimes ?
(je ne suis pas psy)
enora

Re: Collègue dépressif

Message par enora »

Je pense comme dit Azurys. Et que le mail que vous lui enverrez soit le dernier.
Probablement que ceux qui ont voulu la licencier la connaissaient mieux que vous.
Coupez les ponts. Elle se nourrit de votre energie.
Mokuren
Messages : 4
Inscription : 15 nov. 2012, 11:56

Re: Collègue dépressif

Message par Mokuren »

Merci beaucoup pour vos réponses. Il est certain que je ne peux rien faire. En fait, j'ai tenté de le lui faire comprendre implicitement, mais j'aurais dû être plus directe.

Aujourd'hui, plus je pense à cette histoire, plus je trouve que notre relation d'amitié se base sur de mauvaises raisons, à savoir la rancœur qu'on avait toutes les deux vis-à-vis d'une personne, en l'occurrence notre chef d'équipe. Or pour ma part, même si j'avais effectivement quelque chose à reprocher à cette dernière, je pouvais largement tourner la page et prendre les choses avec plus de philosophie. Mais à force de ruminer tout cela avec E, j'en suis venue à ne plus savoir si mes sentiments négatifs partaient vraiment de ce que j'avais personnellement à reprocher à ma chef, ou de ces conversations où E et moi la dénigrions. En repensant à tout cela, je ne suis pas très fière d'avoir pris part à ces conversations. Moi qui pensait ne pas être quelqu'un de spécialement influençable, pour le coup je me suis vraiment fait influencer. Étrangement, c'est en écrivant ce post il y a quelques jours que j'en ai vraiment pris conscience. Cela ne remet pas en question la souffrance de E et le fait que j'aurais voulu pouvoir l'aider mais comme vous le dites si bien, c'est un psy qu'il lui faudrait, pas une ancienne collègue faisant office de déversoir.

Depuis hier, je n'ai pas reçu de mail. Elle m'a dit dans son dernier message qu'elle avait conscience de me saouler avec ses problèmes (tout en continuant par la suite à me raconter ses démarches). Je n'ai pas répondu et je pense que si elle ne me recontacte pas, je ne lui écrirai plus. Si elle recommence, je tenterais de lui dire plus clairement les choses. Effectivement, je crois que couper les ponts est encore la meilleure solution...

Merci encore !
Azurys
Messages : 1156
Inscription : 29 juin 2012, 19:30

Re: Collègue dépressif

Message par Azurys »

(Mais dites-lui bien que voir un psy l'aiderait si elle veut s'en sortir.)

Vous avez bien fait, je crois que couper les ponts est la seule vraie solution dans cette situation.
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