c'est quoi mon problème?

[maral]

bonjour,
je suis nouvelle et je voudrais exposer mon problème, j'ai 21ans

alors voila mon problème:
je ne suis pas à l'aise avec les gens, en même temps je connais beaucoup de personnes,j'ai des amis, mais je n'ai jamais senti un soulagement après une conversation avec eux,surtout si je leur raconte mes problèmes, je sens qu'ils me jugent tout le temps et qu'ils vont prendre une mauvaise image sur moi; aussi si je suis avec un groupe de personne je ne peux dire mon avis que si quelqu'un le partage aussi, pour que je sente soutenue. avec les inconnus, je suis totalement incapable de discuter, de donner mon avis, de maintenir une discussion pour 5 mn, impossible, donc on me voie comme une anti-sociale, une ennuyeuse! mes amis sont très différents de moi, donc je me disais que c'était ça le problème mais au fait non: j'ai rencontré il y a 2 semaines une fille (on n'est dans la même classe) et j'ai découvert qu'on étaient très similaires dans nos avis, nos goûts, notre"philosophie" vis-à-vis du monde et tout, mais la même chose toujours cette peur et ce malaise après une discussion!
je ne sais plus quel est mon problème, je suis à l'aise avec ma famille, et c'est tout! sinon il y a toujours une peur, "j'aurais pas du dire ça et ça!", "elle va penser que je suis comme ça et ça", "personne ne m'apprécie" bref, je n'ai pas confiance en moi, il faut dire que j'ai des insécurités à propos de mon apparence, et durant mon adolescence je me suis trop renfermée sur moi même, en plus je n'ai pas l'habitude de raconter à quelqu'un mes problèmes ou d'exprimer mes sentiments, déjà je n'éprouve pas ce besoin, je pense que tout cela a contribué!
c'est quoi mon problème? je ne sais plus!! confusion!

[Apex]

Un problème d'auto-censure peut-être. Tu t'interdis de parler sans faire au préalable des hypothèses sur ce que vont en penser les autres. Tu élimines ensuite tout propos à risque. Toutes ces réflexions gênent le laisser aller nécessaire à la conversation.

Je partage certains de ces problèmes, mais j'ai résolu celui de la conversation avec les inconnus. J'ai commencé par observer les gens que je trouvais très sociaux. Première surprise : ils n'ont rien à dire. A l'époque, j'ai trouvé d'autant plus mystérieuse la capacité de certains à créer des liens. Mais il n'y a rien de mystérieux. Une conversation n'est pas un colloque, on ne vient pas avec des réflexions jaugées, mesurées, conçues pour répondre d'avance au maximum de critiques. Il y a dans la conversation une grande part de phatique, elle sert avant tout à créer un lien. Ce qui se dit vraiment, dans une conversation, surtout dans une conversation entre deux inconnus, se passe au-dessus ou en dessous de ce qui se dit apparemment. C'est pourquoi elle peut-être tout à fait futile, incohérente dans ses enchaînements, ponctuée d'aveu d'ignorance, de lieux communs, de curiosités banales, de questions convenues - "Tu fais quoi dans la vie ?" - de méta-discours... Et de silences, aussi. Apprendre à se laisser aller, car l'important n'est pas dans ce qu'on dit.

Et peut-être qu'apprendre à se laisser aller nécessite aussi d'accepter l'échec. Oui, il y a des gens qui vont te trouver ennuyeuse, futile, bête, etc. Mais à moins de vouloir être l'ami de la Terre entière, ces jugements sont sans importance et sans conséquence. La question est plus délicate quant aux amis et aux problèmes personnels : en parler peut aussi permettre de faire un tri, mais ce tri est autrement douloureux. Je crois que les amis à qui parler de soi de cette manière sont rares : la plupart ont une capacité assez limitée à y répondre, et ne sont pas faits pour ça. Reste que te censurer ainsi, là non plus, n'est sans doute pas une bonne idée.

[maral]

Apex: merci beaucoup, très belle analyse!