Difficultés famililaes, sentiments enfouis

[Branwen]

Bonsoir,

j'ai besoin de conseils
J'ai 22 ans et je suis issue d'une famille dans laquelle ma mère prend beaucoup de place, elle et ses manies, ses besoins, ses opinions.
J'ai mis beaucoup de temps à comprendre cela, et en discutant avec mon frère et ma sœur, tous deux (beaucoup) plus âgés, on tombe assez d'accord sur tous ces points.

De fait, ma mère a presque toujours considéré qu'elle avait un droit fondamental à être malheureuse et à souffrir et nie absolument qu'une autre personne puisse se sentir mal, ou alors elle considérera toujours que sa situation à elle est pire.
Elle se plaint d'avoir des horribles enfants qui ne viennent jamais la voir (je vis pour les études à 150km de chez mes parents et je rentre environ un week-end sur deux chez eux), qui ne sont jamais là pour elle alors qu'elle a tout fait pour nous, de se lever la nuit quand on était malade enfant à payer nos études plus ou moins longues (de ma sœur infirmière qui a quitté soudainement la maison à 20 ans et s'est donc débrouillée car elle a coupé les ponts (depuis c'est la fille indigne de la famille) à mon frère devenu ingénieur à moi qui fait des études à la fac)

Depuis l'adolescence, dans ce climat (sans évoquer d'autres détails de l'histoire familiale il en faudrait dix pages), je me suis toujours sentie mal. Parce que ces discours elle les tiens depuis des années et qu'à l'époque, si mon frère et ma sœur étaient partis de la maison, je les entendais quotidiennement alors, en plus des problèmes au travail de ma mère que j'entendais quotidiennement depuis mon enfance, elle m'a toujours tout raconté. Mon père lui est peu présent avec un boulot assez prenant et j'ai assez de mal à communiquer avec lui.

En apparence, quand je suis avec ma mère, ça va quiconque nous verrait nous prendrait pour un duo mère-fille normal, mais, je dois toujours prendre des pincettes, éviter les sujets qui fâche, ou alors aller dans son sens parce qu'au fond, elle ne veut pas vraiment savoir ce que je pense, et je sais que si je lui dis ce que je pense vraiment, elle risque de s'énerver, ou, si elle ne le fait pas, de me le faire regretter plus tard ou de me sortir d'un ton accusateur un "ah, mais on ne peut pas discuter avec toi !" En fait il faut aller dans son sens pour éviter les disputes, et c'est toujours ce que je fais, j'ai peur du rejet, d'être considérée comme une méchante si je m'oppose en quoi que ce soit à elle (rien que pour un choix de film au ciné si on y va ensemble, si je choisi le film et qu'après il ne lui plait pas, j'en entends pendant des jours, alors que si c'est l'inverse, que je dis que ça ne me plait pas, c'est "mais toi t'aime rien"). C'est comme de vivre en tyrannie, on ne peut pas dire tout haut ce qu'on pense, sous peine d'être exclu sans retour en arrière possible (c'est ce qui est arrivé à ma sœur)

Du coup, depuis toujours, j'ai gardé pour moi tout ce que je pensais et ressentais, je n'ai jamais laissé place à mes émotions autres qu'un certain stoïcisme feint, une faux calme un peu béa le plus souvent pour faire plaisir à ma mère, le tout doublé d'anxiété latente qu'elle ne découvre ce stratagème parce que, comme elle le dit si bien, j'ai "tout pour être heureuse et pas de raison d'être malheureuse, parce que j'ai mes deux parents, de la bonne nourriture, un toit sur la tête et qu'elle à mon âge avait déjà plus son père, et avait un enfant à charge".
J'ai trouvé des moyens de m'évader, pour tenir le coup (encore maintenant)

En fait, ce calme apparent est presque devenu une seconde nature et j'ai l'impression d'avoir du mal à ressentir des émotions. J'arrive à rire de blagues, à pleurer de temps en temps quand c'est trop dur (les nerfs lâchent), mais j'ai l'impression d'avoir enfouis trop profondément tous les sentiments possibles et imaginable au plus profond de moi. J'ai du mal à m'émouvoir de choses qui font pleurer les autres comme des madeleines, même si j'ai conscience que la chose en question est triste, ou alors je fonds en larme sans trop de raison devant un truc qui fait écho en moi à quelque chose de douloureux. J'ai aussi du mal à aimer, à avoir de l'attachement pour les gens autour de moi, quels qu'ils soient. J'ai conscience que j'éprouve des sentiments, je suis parfois triste, je suis contente de revoir des amis ou des gens que je n'ai plus vu depuis longtemps, mais c'est toujours vague, lointain et bien souvent je feins lorsque je suis en société.
Cela dit, j'ai l'impression d'avoir repoussé ces sentiments au fond de moi, d'une manière ou d'une autre, parce que j'ai l'impression parfois de bouillonner tout au fond de moi sans avoir accès à tout ça (je ne sais pas si je me fais comprendre). En fait j'ai surtout peur de craquer un jour sans raison sur un truc débile et de finir totalement folle.

Et voilà le motif de ma présence ici, j'aurais besoin de conseil pour réussir à renouer avec ces sentiments qui sont, je pense, enfouis en moi. Est-ce possible déjà de repousser ce qu'on ressent comme je le décris ? Comment retrouver tout ça ? Est-ce possible ?