Père absent

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Djali
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Père absent

Message par Djali »

[Attention, pavé en vue !)

Bonjour,

Je viens vers vous aujourd'hui car je sens que je perds pied, je ne sais plus quoi faire ni comment réagir.
Mes parents ont divorcé quand j'étais au collège, de mémoire. Mon frère et moi sommes passés en garde alternée. Très vite, mon père a fait emménager avec lui (donc avec nous) sa nouvelle compagne - que j'ai très mal acceptée - et les 2 filles qu'elle avait.
Si les premiers temps se sont relativement bien passés, j'ai très vite étouffé des nouvelles règles imposées, de ces "présences extérieures chez moi". J'étais alors adolescente, ce qui n'a rien arrangé. Je ne me rappelle pas de crises violentes, de disputes qui auraient éclaté, de cris. Je sais simplement que ça a été très tendu, et de plus en plus, au fil des années. Je fuyais la maison de mon père pour être le plus souvent possible chez ma mère (chaque excuse était bonne et, coup de chance, elle vivait plus près du lycée : mes cours commençant tôt m'arrangeaient bien). On a fini par se mettre d'accord avec mes parents : je resterais chez ma mère la quasi-totalité du temps, et chez mon père un week-end sur deux et la moitié des vacances.
J'ai très, très, très peu de souvenirs de cette période. Des ressentis, émotions, quelques images fixes que je n'arrive pas à "mettre en mouvement". C'est très angoissant.
Je sais juste que c'était très tendu.
Je suis entrée en première année de licence à la fac. Quelques jours après mes 18 ans (et ce moment est encore très vif dans ma mémoire, pour le coup), mon père m'a appelée lors de ma pause en cours. Il voulait que je quitte la maison. Je me suis effondrée dans les bras de mes copines, ait séché mon cours magistral de droit (quand je vous dis que je m'en souviens comme hier...) et j'ai vidé ma chambre pour tout emmener chez ma mère.
Pendant quelques semaines, j'ai continué à voir mon père. On allait manger au restaurant, c'est arrivé 3 ou 4 fois. Mais je ne supportais pas ces moments hypocrites, j'étais triste et en colère. Un jour, il m'a appelée pour me demander si je voulais qu'on retourne manger ensemble, et je lui ait dit que non. Que je n'y arrivais pas. Il a eu l'air triste - je l'étais aussi, et à quel point - et m'a dit qu'il serait là quand je voudrais revenir vers lui.

Un peu plus d'un an plus tard, je l'ai recontacté. Il m'a hurlé dessus au téléphone : j'avais ruiné sa vie, tout était de ma faute. Je me suis (encore une fois) écroulée, et j'ai raccroché. Il m'a immédiatement rappelée 3 fois ; je n'ai pas décroché.

Comme je l'ai dit, j'ai très, très, très peu de souvenirs de cette période. Mais je ne peux pas m'empêcher de me demander si j'ai réellement été une ado aussi infecte, aussi ignoble, aussi insupportable qu'il le dit. Toute cette haine de la part de cet homme - devenu un étranger - qui a pourtant été un si bon papa dans mon enfance... J'en viens à douter de moi-même.
Il s'est également beaucoup disputé avec ses parents (que je vois très régulièrement) à cette période, et ne parle toujours pas à mon grand-père.

Aujourd'hui, j'approche les 22 ans ; ça va faire 4 ans que je ne l'ai pas vu, que je ne lui ai pas parlé. On s'envoie un SMS poli à chaque anniversaire. Parfois à Noël. Lui m'en envoie un quand j'obtiens mon année ou un diplôme.

En ce moment, je pense à lui sans arrêt. C'est une obsession. J'en cauchemarde la nuit. Je ne le vois pas, mais je rêve qu'il s'est suicidé. Je me réveille en criant, en larmes, dans un état de frustration incroyable... Qui serait exactement le mien si ça arrivait, "ça ne peut pas s'arrêter là, comme ça".
Je doute beaucoup de moi : pour que mon propre père ne veuille plus de moi, quelle genre de personne suis-je ?
Toute mon enfance, je l'ai admiré... Et je pense qu'une partie de moi l'admire toujours. Je voudrais qu'il soit fier de moi.
Je n'arrive pas à différencier les "2 hommes" qu'il a été et qu'il est. Je suis complètement tiraillée entre ces deux versions qu'il me donne à voir.

Je fais tout pour "provoquer son attention", si l'on peut dire. Il voit encore mon petit frère, est en contact avec ma mère. Je sais bien qu'au fond, beaucoup de choses que j'ai faîtes ont été pour lui. Je lutte comme une folle, jusqu'à épuisement, pour être la "meilleure personne possible".

Aujourd'hui j'ai 21 ans, j'ai décroché ma licence et mon Master 1 avec mention, ai suivi des cours à distance, ai énormément travaillé, voyagé, lu, je suis investie dans plusieurs associations. J'ai réellement apprécié ces moments, je les ai bien sûr vécus pour moi, je crois aux causes que je défends, mais une part de moi se dit tout de même "Là non plus, il ne veut pas de moi ?".
Je suis devenue enseignante dans le primaire (oui, oui, j'ai de l'avance !) et pour la rentrée prochaine, j'ai été affectée dans une école primaire de la ville où il vit. J'ai, stupidement, envie de croire à "un signe".

Ma grand-mère, qui le voit de temps en temps, m'a dit quelques fois d'un air triste que si je revenais vers lui, j'en prendrais "plein la tronche, et encore pire de la part de sa copine". Il a également dit qu'il ne reviendrait pas vers moi. En même temps, il a aussi dit que j'aurais "peut-être un bébé un jour, qu'il verrait jamais", mais sans plus de commentaires. Si je suis évoquée (à ce qu'on me dit), la personne est fusillée du regard. Je suis complètement perdue.

Je suis triste, et très en colère. Je me sens très seule, avec l'impression que personne ne peut vraiment comprendre ma situation. Je me sens coupable de ce qui m'arrive, sans savoir exactement ce que j'ai fait pour mériter ce qui me tombe dessus. J'ai certainement des tords, je ne remets pas ça en question. Je pense que nous en avons tous les deux. Mais j'aimerais simplement tourner la page, mon papa me manque.

Il a écrit un livre l'année dernière, que je viens juste de lire. Apparemment, ça a été son exutoire pour ne pas se "foutre en l'air", qu'il n'était pas bien, etc etc etc. Le bouquin ne parle pas de lui, mais quelques phrases ont fait tiquer plusieurs personnes de mon entourage. Notamment un paragraphe, dans lequel je suis plutôt visée, qui parle du "délire" de personnes qui provoquent leur propre chute et se "victimisent" ensuite.

Il est bénévole auprès d'enfants et ados en difficulté. Rien que d'y penser, ça me donne la nausée. C'est très égoïste, mais je me dis... "Des inconnus plutôt que moi ?".

Enfin bref... J'ai, encore une fois, des tords certains. J'ai sûrement été difficile à vivre, il a sûrement été blessée que je lui dise, un jour, que je ne voulais plus aller manger avec lui pendant quelques temps. J'ai mes tords. J'avais 18 ans, j'avais sale caractère, j'avais mal géré le divorce, j'étais sûrement une gamine insolente et agaçante. Sûrement.

Mais aujourd'hui, je vois les années et les évenements s'enchaîner, sans mon père (qui habite pourtant à 7min de chez moi exactement). Et ça me brise en mille morceaux.

Je ne sais plus quoi faire, ça me hante, je ne suis jamais tranquille...
Mais ça fait déjà du bien de l'écrire.
Dubreuil
Psychologue clinicien
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Inscription : 03 août 2012, 17:28

Re: Père absent

Message par Dubreuil »

Djali a écrit :[

Je suis triste, et très en colère. Je me sens très seule, avec l'impression que personne ne peut vraiment comprendre ma situation. Je me sens coupable de ce qui m'arrive, sans savoir exactement ce que j'ai fait pour mériter ce qui me tombe dessus. J'ai certainement des tords, je ne remets pas ça en question. Je pense que nous en avons tous les deux. Mais j'aimerais simplement tourner la page, mon papa me manque.
.
Vous pouvez aussi écrire.
Vous pouvez aussi lui écrire, une très simple et petite lettre " digne ".
UNE PROPOSITION :
Lui dire que vous avez grandit. Que vous avez mûri.Que vous n'êtes plus l'adolescente qui lui a causé tant de tourments ( pour l'instant faites profil bas ) que toutes ces années sa présence vous a manqué, mais que maintenant vous comprenez son silence etque votre lettre n'est qu'une mise au point, que vous vous excusez pour tous les tracas d'adolescente que vous lui avez causés ( ne demandez pas pardon ! ) et que quoi que la vie vous réserve vous penserez toujours à lui avec tendresse et gratitude pour le " bon papa " qu'il a été durant votre enfance.
Vous l'embrassez et vous signez sans ne plus rien ajouter.

Ensuite, vous ne le relancez surtout pas. Vous attendez. Il répondra.
PSYCHOLOGUE CLINICIEN - ANALYSTE
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